Mégalomanies : architecture, urbanisme et leurs fictions
Le court film Megalomania, de Jonathan Gales 1, suscite, depuis sa mise en ligne l’été dernier, une fascination à l’échelle de ses protagonistes, une ville et son architecture portrayées dans un incommensurable chantier figé. Authentique produit post-humaniste, le déferlement des scènes piranésiennes de Megalomania permet de saisir l’inadéquation d’une certaine architecture contemporaine aux besoins de la ville à l’ère du développement durable. Longtemps une pratique à l’échelle d’homme, la planification urbaine est devenue, au cours des dernières décennies, une affaire d’édiles toujours plus autocratiques et toujours moins démocratiques, exigeant l’érection de bâtiments iconiques pour rassasier la voracité d’un capitalisme effréné.
Le gigantisme a ponctué toute l’histoire de l’architecture : des pyramides aux demeures du mont Palatin ; de la muraille de Chine au château de Versailles ; des palais pour les expositions universelles aux barres d’habitations de l’après Deuxième Guerre ou aux mégatours corporatives. S’il a revêtu pendant plusieurs siècles la posture de la monumentalité 2, le gigantisme a représenté, et représente toujours, le pouvoir politique, économique et la démographie galopante 3. Il a généré et génère encore une utopie de la mégastructure et de la topographie artificielle, telle que l’avaient proposée, il y a plus de cinquante ans, Yona Friedman et Constant Anton Nieuwenhuys 4 ; la force symbolique et iconographique de ces concepts perdure et transcende d’ailleurs à ce jour l’imaginaire en se concrétisant matériellement dans le discours de la mondialisation et, virtuellement, dans l’architecture numérique.
Ce gigantisme architectural et urbain serait donc
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