Le destin des monuments : réflexions sur la commémoration publique
Les années 2017 et 2018 ont été ponctuées de débats concernant le destin des monuments. À La Nouvelle-Orléans, aux États-Unis, quatre œuvres commémorant la Confédération et la guerre de Sécession ont été retirées en mai 2017. Dans les mois qui suivirent, les villes de Baltimore, Charlottetown, New York, Los Angeles et Durham se sont aussi délestées de monuments témoignant d’un passé esclavagiste. Les exemples de destruction et de déboulonnement ne se limitent pas aux États-Unis; on peut citer des cas semblables en Australie, en Hongrie et en Belgique, qui révèlent un malaise grandissant par rapport aux héritages coloniaux, religieux, totalitaires et autres. Au Canada, dans la foulée du rapport de la Commission de vérité et réconciliation (2015), les monuments présentant des personnages historiques ayant contribué au racisme systémique et à la marginalisation des peuples autochtones sont de plus en plus décriés. Une statue dédiée au général Edward Cornwallis, militaire britannique et gouverneur de la Nouvelle-Écosse de 1749 à 1752, a notamment été retirée d’un parc de la Ville de Halifax, le 31 janvier 2018, à la suite de pressions populaires contre la présence dans l’espace public de la figure de cet homme, connu pour avoir offert une prime à quiconque lui rapporterait un scalp d’homme, de femme ou d’enfant mi’kmaq. Si le malaise n’est pas partagé par tous, et que certains refusent toute remise en question des monuments, un constat doit néanmoins être posé : ce qu’Henri Lefebvre décrivait comme l’« illusion de la transparence » est rompue2. Dans le
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