L’art sur le terrain de l’Internet de la valeur
Il y a maintenant plus de dix ans, la revue ESPACE art actuel (anciennement Espace sculpture, fondée en 1987) relevait le défi de renouveler sa réflexion critique sur les arts visuels, essentiellement tournée vers le domaine de la spatialité. L’intention était d’examiner à nouveaux frais ce qu’il en est de la sculpture alors que la notion d’espace ne se résume plus à la géométrie euclidienne, et que notre rapport au monde se complexifie à l’image des réseaux transnationaux et informatiques sillonnant la planète. Ce numéro marque ainsi un tournant et une ouverture vers ces espaces mouvants que l’anthropologue Arjun Appadurai désigne des paysages de la mondialisation, qu’ils soient médiatiques, technologiques ou idéologiques.
Le dossier porte plus spécifiquement sur l’univers de la blockchain, véritable écosystème numérique faisant pression sur les institutions hors ligne et présageant un remaniement de ses propres structures. La communauté d’actionnaires de la blockchain grandit et réunit des utilisateur·trice·s aussi varié·e·s que des programmeur·euse·s, des investisseur·euse·s, des activistes ou des criminel·le·s autour de cette solution technologique au contrôle étatique ou bancaire. Et aux mains des artistes, les potentialités plastiques, symboliques et techniques de la blockchain se révèlent et dépeignent un champ de pratique lucide et critique, détonnant avec son appropriation par les « tech-bros ».
La blockchain est une base de données (ou un ledger) distribuée et partagée sur le réseau informatique par le biais des nombreux ordinateurs connectés simultanément. L’architecture de cette base de données est composée de blocs – et non de lignes comme dans un
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